En ce moment, vous l’aurez compris si vous me suivez sur twitter, je suis assez fâchée avec Instagram. J’ai donc décidé de vous faire la liste de tout ce qui me dérange sur ce fameux réseaux social. Notamment quand on est une fille qui fait du sport ou qu’on suit des filles qui font du sport, ou pire encore qu’on suit des « influenceuses » en sport. Et ensuite, essayons de chercher des solutions !
Attention, il s’agit bien sûr d’une généralité, heureusement on trouve aussi plein de pépites, de filles super chouettes, de comptes différenciants, de motivation à gogo. Ensuite, je m’inclus complètement dans le même panier que ces réflexions, d’ailleurs j’ai choisi des exemples issus de mon propre compte parce que je sais que moi aussi je peux être un cliché d’Instagram.
Instagram pourquoi on en a marre
1/ Tous les mêmes ?
Je me suis rendu compte récemment que les comptes que je suivais ou ceux sur qui je tombais dans des articles « 10 comptes de sport / de running / de « fitgirl » à suivre sur Instagram » se ressemblaient tous beaucoup trop. Surtout ceux des filles.
(chez les garçons, c’est les comptes d' »influenceurs » qui, pour moi, sont identiques : même look, même photos voiture, même montre, même filtre, même traitement de l’image, même alternance « photo de moi » / « photo d’une vue magnifique ». Bref, ce n’est pas mon sujet).
Je trouve donc que les comptes des sportives d’instagram ont tendance à se ressembler beaucoup (et je ne fais moi-même pas exception à la règle). Généralement la it-sportive :
- Court avec une team Adidas Runners Paris
- A quelqu’un qui peut la prendre en photo en train de courir (ou d’imiter la pose), sur un pont, au bord du lac, en vacance à la mer (sur une plage)
- Mange des barres de céréales Be-Kind
- Va à la piscine (Pontoise, Blomet…)
- A le maillot Speedo avec les troutrous
- S’est récemment mise au vélo
- Et en a un trop beau
- Est tentée par le triathlon
- Et par le trail
- Fait du renforcement musculaire chez elle ou en salle
- Utilise Strava ou Nike + pour indiquer ses temps de passage sur ses photos de run
- Fait des photos dossard / tenue avant chaque course et une photo médaille après (c’est ce qui marche le mieux, croyez-en mon expérience)
- Se fait des jolis bowls avec des fruits et des noix
- Partage parfois des recettes
- Assez rarement mais ça arrive, fait une photo avec ce « un look de fille » c’est à dire en robe
bah oui moi aussi j’ai le même maillot que toutes les blogueuses, mais en vrai il est chouette
Evidemment, c’est normal, on aime les mêmes choses, on s’influence les unes et les autres (et on se motive !), et les marques font bien leur travail pour uniformiser les goûts et les couleurs. Mais Instagram étant devenu un réseau social à beaucoup de millions d’utilisateurs et le running étant encore en plein boum, trop c’est trop et j’ai l’impression de ne plus savoir sur quel compte je suis quand je surfe au hasard de mes followings et discover.
2/ Que du fake ?
Pas mal d’articles ont dénoncé ces derniers temps les grosses mises en scène d’Instagram. Alors, évidemment on le sait, Instagram ça n’est pas la vraie vie et il est normal d’embellir son quotidien sur un réseau qui consiste à partager de belles images.
Mais entre achat de followers, robot à like, commentaires dénués d’humanité « nice shot« , pratiques « je te suis tu me suis« , « je te like, like moi hein« , on plane carrément dans une autre dimension. Celle de l’automatisation, où, quand vous ne déléguez pas le travail à un robot, vous likez frénétiquement toute votre timeline pour qu’on vous aime en retour.
Ce compte est entièrement fake, explications dans cet article « Here’s how easy to become a phony influenceur on Instagram«
Côté prise de vue même topo. Pour en arriver à l’uniformisation décrite ci-dessus, il vous faut être parfaite. Si mettre en scène sa photo, trouver le meilleur angle, la bonne lumière, votre bon profil… relève simplement des règles de l’art, quand on en arrive à gommer des touristes, se photoshoper le moindre bout de peau qui pourrait ressembler à un bourrelet, ou carrément déformer la réalité (pas le bon jour, pas le bon lieu), on touche à l’absurde et on se crée des complexes à soi ou aux autres avec sa vie (pas si) « parfaite ».
3/ La surenchère de l’entrainement et de la performance
Comment ai-je pu oublier ce point, alors que c’est ce que je trouve le plus malsain dans le sport sur Instagram ? Au début on se dit que ces images de filles en train de courir, ces séances de run partagées, ça motive et ça donne envie de s’y mettre aussi. C’est vrai. Mais attention à la surenchère. ! Il n’y a pas que la course au like, il y a aussi la course, la vraie !
De plus en plus de sport, de plus en plus d’entrainements, 6 ou 7 photos de sport par semaine. Le fractionné, la sortie longue, le renfo, encore le renfo, la sortie avec sa team…. Toutes bigorexiques ? Je n’irai bien sûr pas jusque là, mais ça dégage parfois une impression de too much, de surenchère « regardez je me suis entrainée 6 fois cette semaine ! ». On a aussi tendance à embellir ses sorties, à ne pas toujours en dire les difficultés rencontrées tellement on veut être la plus forte. (A ce sujet lisez ceci)
La dérive à tout ça c’est la compétition, la mise en rapport avec les autres, et parfois même un peu de mesquinerie. On finit par stalker les temps des autres avec leur numéro de dossard, par étudier leur plan d’entrainement, par se mettre la pression sur son résultat à une course.
Plus on a de followers, plus on est soumise à la pression du résultat : vous annoncez vous entrainer pour une course, vos lectrices vous attentent parfois au tournant, et il arrive que ce ne soit pas toujours bienveillant. (ça reste heureusement une exception parmi de nombreux encouragements et félicitations)
J’ai l’esprit de compétition, je ressens forcément un peu de fierté quand je finis une course (quand j’ai fini le marathon), mais je sais aussi encore me réjouir des succès des autres, soutenir les copines qui n’ont pas atteint leur objectif, et je ne me réjouirai jamais d’une blessure ou d’un échec de quiconque. Par contre, je peux critiquer un plan d’entrainement ou fanfaronner sur le mien si le coeur m’en dit, personne n’est parfait 😉
La « sportive d’instagram » n’est pas une athlète olympique, on trouve de tous les niveaux et ce n’est pas proportionnel au nombre d’abonnés (heureusement !). On attend parfois beaucoup d’elle, et il existe aussi un certain questionnement de la part des « sportifs pas d’instagram » (ou juste moins influents). Car les marques offrent des chaussures, des tenues de running et des dossards pour les courses en fonction de la visibilité, pas forcément du niveau… Je comprends cette petite pointe de jalousie, cette impression que le marketing a tout pourri, mais c’est aussi l’occasion de relever de nouveaux défis et d’aider beaucoup de monde à se lancer !
4/ Toutes à poil ?
Alors oui c’est l’été, on court en short, ou en brassière, on ne fait pas du paddle en combinaison intégrale, et on profite de la plage. Là encore, tout est question de mesure. C’est comme le soleil : il n’y a pas de mal à s’exposer un peu, mais attention aux abus !
Nous sommes toujours les premières à dénoncer les publicités qui utilisent mal l’image de la femme, les médias et marques qui médiatisent le sport féminin en ne parlant que du physique des athlètes (à ce sujet je vous invite à lire ce coup de gueule Surf sur pourquoi on représente les hommes en action et les filles en bikini).
Alors pourquoi ce too-much d’abdo-fessiers ? Cette sur-exposition de corps bronzé et musclé ? Parfois accompagnés de messages (sincères) sur les complexes. Ces pauses un peu sexy à la Alana Blanchard ?
« J’ai toujours une bouteille d’eau avec moi, car quand on fait du sport c’est important de s’hydrater assez »
Je ne peux m’empêcher de trouver ça un peu hypocrite et que ça donne des complexes, que les instagrammeuses soient (donnent l’impression d’être) des bombes ou qu’elles soient (donnent l’impression d’être) bien dans leur corps. Même quand on sait que Instagram ça n’est pas la vraie vie, que la position peut tout changer, qu’un filtre rend plus bronzée, on ne peut s’empêcher de ressentir ce même sentiment que quand on feuillette ces magazines féminins qu’on critique si facilement : « la vache, je voudrais le même corps qu’elle ».
Et encore, je ne vous parle pas ici des comptes avant / après ou des gourou du fitness qui vous vendent 90€ un pdf pour faire des abdos, mais de ceux des sportives comme vous et moi qui aiment bien plaire, se rassurer, apprendre à s’accepter…
5/ La loi de l’algorithme
Avant, je scrollais, je voyais les photos des gens que je suivais dans l’ordre chronologique, je likais les images que j’aimais bien, j’arrivais au bout, je recommençais quelques heures plus tard. BASTA. Mais ça c’était avant. Aujourd’hui, je vois les photos que tout le monde like, les photos des gens qui font les mêmes photos que moi, ceux qui vont aux mêmes endroits que moi. Je mets 12000 hashtags pour essayer de faire ressortir mes images. Je like les gens qui ont les mêmes univers que moi pour qu’ils découvrent le mien.
J’ai perdu presque 50% d’impressions et je m’agace de voir mon compteur de followers bloqué. Je ne vois plus les photos de mes « vrais » amis, et ils ne regardent pas forcément mes stories. Du coup je fais des photos « qui marchent », c’est à dire les mêmes que tout le monde et ce que ma communauté attend de moi (quand je poste une photo qui n’est pas du run, mon nombre de like chute). Je soigne un peu mes photos, mes légendes, je tague les marques… Quand une image n’est pas ultra-chiadée je la met en story plutôt qu’en publication. Je suis à deux doigts de faire des story pour dire « j’ai fait une photo ».
(ça c’est le compte de ma pote Marion que je voudrais voir plus souvent dans mon flux)
Alors comment se réconcilier avec Instagram ?
Parfois j’ai envie de tout arrêter. Parfois de tout recommencer. Mais je me dis qu’il faut juste que j’arrive à une utilisation plus raisonnée. En ce moment, Instagram m’agace, mais j’y suis tout le temps. Je scrute mon nombre de like, je compulse les photos des autres. Je cherche la photo parfaite et je m’énerve quand elle n’est pas beaucoup vue. Et si je reprenais le pouvoir sur cette appli, au lieu de la laisser me guider ma façon de penser ? Quelques idées et axes de progression :
- y aller moins souvent. Je pars en Bretagne où le réseau est capricieux, ça me fera du bien. Laissons de côté cette phobie de manquer quelque chose, rien d’important ne se passera en mon absence.
- relativiser justement. qu’est-ce qu’instagram ? un réseau social. Je ne gagne pas ma vie avec ça, je ne serai pas plus ou moins heureuse avec quelques images en plus sur mon compte. Et je n’ai pas besoin de montrer aux gens que je passe de super vacances pour passer de super vacances
- rester vraie : arrêter de suivre des gens parce que c’est des it-gens et de tout liker pour avoir de l’impression. Liker ce qui est beau, suivre ce qui est bien, unfollow si besoin.
- ne jamais faire une activité dans le but de faire une photo. C’est une règle que j’arrive plutôt à suivre, mais le jour où je vais courir juste pour faire une photo de mes nouvelles baskets, jetez mon téléphone à l’eau.
- enlever ses oeillères Paris / running / blogueuses, et suivre des sportives de haut niveau, des filles qui font d’autres sports, voire ouhlala des garçons, des plus petits comptes etc… Bref, offrir un peu de neuf à son feed !
- ré-éduquer l’algo : Instagram, comme Facebook s’adapte à ce que je like et ce que je cherche. Quand je commence à suivre quelqu’un, il me montre ses photos pendant 3 jours. Je lui apprends donc qui sont mes amis, les gens que j’aime en allant sur leur profil, en leur envoyant des message, ou en likant leurs photos. ça redonnera à l’application sa vraie vocation : un réseau SOCIAL, et pas une toile de robot à like.
- ne pas se prendre la tête sur la photo parfaite. J’aime bien cette photo, je la poste, même si je sais qu’elle fera moins de like pour une raison.
Un photomontage, une belle tête de winneuse, une bonne footix-neymar-attitude, une photo que je n’aurais peut-être pas postée si j’avais voulu tout contrôler !
Voilà, et si tout ça ne marche pas, je partirai avec mon paddle habiter sur une île déserte où le réseau ne passe pas !