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Le marathon de Berlin : les montagnes russes

La dernière fois que j’étais allée à Berlin, j’avais battu mon RP sur 10km et décidé d’arrêter de me laisser marcher sur les pieds. J’avais aussi dit que je reviendrai pour le marathon. Entre temps j’avais prévu Tokyo 2020 (ils ne m’ont pas retenue, mais ça a été annulé) puis Chicago 2020 (annulé + Roland en même temps). Un marathon pour la reprise des courses sur route, c’est costaud mais on l’a fait !

Inscription optimiste

Début janvier 2021, j’ai commencé à croire à la « vie d’après » et je me suis inscrite en l’espace de deux semaines à l’ultramarin morbihan et au marathon de Berlin (formule RTL Donation : 1000 dossards étaient ouverts sur la base du premier arrivé, premier servi, à un prix qui incluait un don pour les enfants défavorisés). A ce moment là, je voulais tenter le sub 3h15 mais la route du déconfinement était encore très longue et semée d’embûches.

Hiver « Fearless »

En plein couvre-feu, et une semaine après avoir contracté le Covid, je me suis lancée dans la prépa « Fearless », la course virtuelle de Nike pour rester motivée-motivée dans ces temps confinés. Pleine d’ambition, j’ai choisi la prépa marathon, en me disant que ça m’aiderait à retrouver du rythme, que me changerait les idées du confinement et que ce serait une bonne étape avant Berlin. Bien sûr ça ne s’est pas passé comme je l’espérais.

Printemps Burn-out

En avril, une semaine avant la date de la course Fearless (donc après 7 semaines de prépa), explosion du genou. J’ai quand même pris le départ virtuel (Place des Victoires, à trois, un dimanche froid et pluvieux, grosse ambiance), mais la voix de sagesse et la douleur m’ont stoppée avant le 3e kilomètre.

Plusieurs jours d’angoisse, et une visite chez le médecin du sport puis chez le kiné et le verdict est tombé : TFL de surmenage, à force de tirer de tous les côtés sur la course, le boulot, le stress etc. La rééducation : respecter le seuil de douleur (à ce moment là 200m en marchant) et des exercices à la maison et chez le kiné.

Eté prudence

Partie en Bretagne début mai pour souffler, le changement d’air m’a fait du bien et quand je suis rentrée pour Roland-Garros, je marchais presque normalement, les yeux fixés sur l’utramarin et ses 32km. Pendant le tournoi ma kiné m’a fait reprendre très très doucement (par tranches de 1min) la course à pied, ce qui m’a sans doute aidée à tenir moralement. J’ai ajouté progressivement et prudemment de la distance, de la durée et un tout petit peu d’intensité, et j’ai fait confiance à mon intuition pour l’ultra marin qui s’est passé encore mieux que je ne l’espérais.

Le lendemain de l’ultramarin sonnait déjà le début de la prépa Berlin. On prend nos billets, on réserve l’hôtel, ça devient concret, mais le Covid et la douleur au genou ne sont pas encore vraiment derrière nous. J’attaque donc les 12 semaines de prépa marathon avec beaucoup (peut-être trop) de précautions qui m’attaquent un peu la confiance.

Jusqu’au 15 aout, je suis à la traîne, je raccourcis les sorties longues, je fais sauter un footing par ci par là, je lutte à courir 50km dans la semaine, j’ai souvent mal au genou en marchant, et (cause ou conséquence ?) je doute beaucoup d’arriver au bout.

Et puis déclic ! Une séance de vitesse débloque à la fois la douleur trainante au genou et la sensation de ne pas avancer. Je remets mes Tempo, je recommence à parler avec Vince le coach, bref je commence à me dire que je vais le faire. ça ne va ensuite qu’en s’améliorant. Les sorties longues en Bretagne, puis le retour à Paris et les séances avec Viens M’Attraper continuent de me rassurer et de me prouver que je suis toujours (ou de nouveau ?) capable de courir un marathon. L’été s’achève, et bim, il est temps pour Julie, Vincent, Mathilde et moi de décoller pour Berlin.

Pré-course stress et excitation

Quelle émotion de recourir un marathon ! Un major à l’étranger qui plus est ! Le shake-out, le retrait dossard, le dernier repas à l’italien se passent un peu dans le brouillard : je ne réalise pas vraiment que ça y est, on est sur le point de prendre ce départ tant attendu et en même temps je stresse de ne pas y arriver. Petit déj à l’hôtel, enfiler sa tenue, accrocher sa puce, épingler son dossard, arriver en avance, déposer son sac à la consigne, passer aux toilettes et se mettre dans le sas. La bonne vieille routine de départ de course.

Marathon de Berlin : départ tout feu tout flammes

Dans le sas, je suis avec Julie, on se fait des petits pep talks mais je lui dis « pas trop d’émotions après je vais plus réussir à respirer« . On s’était dit de laisser faire la course sans chercher à courir ensemble : si on se retrouve tant mieux, sinon, rendez-vous à l’arrivée ! Je pars un peu vite, comme toujours, pour lancer la machine, mais j’essaie de ne pas trop forcer. Je tape quand même deux belles accélérations pour dépasser les meneurs d’allures 3h30 et le groupe de gens agglutiné autour, et ensuite j’essaie de me caler sur le rythme « je me sens bien mais je brule pas toutes mes réserves ». Je vois beaucoup Julie, je me sens bien, on continue. Premier gel au kilomètre 9, 2e au 20e, de l’eau régulièrement. On passe le semi en 1h40 et je dis à Julie « allez, on refait la 2e moitié pareil« . Si elle m’a écoutée, mon corps, lui, a décidé qu’on allait commencer à en baver.

25e-39e, l’ascenseur émotionnel

Si le marathon de Berlin est réputé pour être très plat, mon organisme, lui, a décidé de jouer aux tunnels des quais parisiens avec des hauts et des bas à la fois physiques et mentaux. Dés le 22eme environ j’ai un petit peu ralenti (et mentalement ça m’attaque un peu) et perdu Julie. Une sorte de point de côté à mi-chemin entre douleur de règle et digestion du gel a commencé à me gêner, et les jambes à tirer en même temps. Au 25e, j’ai décidé de mettre le Spasfon qui était dans ma poche sous ma langue et j’ai pensé très fort à ce que m’avait dit Vincent la veille « à un moment tu vas avoir mal mais tu t’accroches et ça passe ». J’arrive à ne pas trop ralentir, et tout d’un coup, en effet, un vrai coup de mieux. Je passe le 30 avec le moral remonté en flèche, d’autant plus que je double pas mal de monde.

Mais bien sûr, ce serait trop facile, ça ne dure pas et ça retombe un peu après le 32e. Je m’accroche à ma technique des blocs et je me dis « allez on va jusqu’au 35, et au 36 il ne restera plus grand chose. » Tant bien que mal j’arrive au 36e kilomètre, je n’arrive plus trop à compter mais je prends un dernier gel pour avoir du jus à la fin de la course. A ce stade, je m’arrête aux ravito car je n’arrive plus à boire en courant et encore moins à avaler le gel.

Entre le 36e et le 40, c’est vraiment très dur, je me dis que c’est pire qu’un premier marathon tellement j’ai l’impression de découvrir comme c’est difficile (pourtant j’ai pas mal souffert au Marathon de Londres). Mes jambes sont clairement en saturation depuis un moment et je manque d’énergie. Il me reste donc le mental. Je me répète des pensées positives, je me dis que je l’ai déjà fait, que je vais finir par le faire, que le temps on s’en fiche. Je me rappelle qu’il y a quelques mois je ne pouvais pas aller au Picard en bas de chez moi tellement j’avais mal au genou. Bref, je serre les dents, et soudain (ou enfin ?) le panneau 39.

39-42 la délivrance

Je retrouve ma capacité à calculer et je regarde pour la première fois depuis le semi le temps global sur ma montre : 3h11 « Ok, 20 minutes pour faire 3km et c’est les 3h30« . Je me remobilise, j’arrête de m’arrêter tout le temps, objectif d’abord le 40.

Au 40e, je me dis franchement que plus rien ne peut m’arriver, que je vais arriver au bout, je repars un peu plus vite. Le panneau du 41, hop on continue. J’entends la soeur de Julie qui m’encourage, ça me fait du bien. Un virage et je vois la porte de Brandebourg au bout de la ligne droite. Je sais que l’arche d’arrivée est « un peu » derrière, j’accélère. Il y a beaucoup d’ambiance, pas mal d’émotions, c’est beau, mais je me dis que je vais vomir. Tant pis, je passe la porte, je vois la ligne d’arrivée, j’accélère encore un peu pour accrocher le 3h25. (Temps officiel 3’25’44)

Je passe la ligne, j’ai envie de m’effondrer. Je récupère sur la barrière, j’avance un peu et je tombe sur Queen Julie qui me remorque jusqu’à la médaille, puis à la consigne où je m’allonge carrément par terre.

Le reste n’est que bières, gentils messages et fierté.

Merci bien sûr à Vince qui m’a suivie tout au long de ma prépa et secouée quand il fallait, à Julie pour cette fin de prépa et début de course ensemble, et à sa famille pour les encouragements sur place, à Mathilde pour le cheering en chef, à tout VMA qui nous a suivi sur What’s app et Facebook, à tous mes proches qui m’ont encouragée et félicitée, à ma kiné qui m’a remis sur pieds…

Côté équipement qui ne court pas à ma place mais qui aide un peu quand même, vive mes chaussures de Kenyan les Next d’anniversaire, les 25% Nike, les gels overstims caramel beurre salé, les culottes Smoon, la montre Garmin qui a jugé cette sortie « productive », les chaussette Incyclence qui m’ont valu zéro ampoules (mais un ongle bleu)…

Merci Berlin ! Mon 2e Major (après Londres) et mon 4e marathon (après 2 fois Paris). Pas de RP mais un objectif rempli et une sensation de « come-back » atteinte. Bref, une belle victoire malgré les difficultés. Le prochain ? trop tôt pour le dire mais j’ai très envie de m’attaquer à New York dans pas trop longtemps, et le marathon grand public de Paris 2024…

Marie

rédactrice web freelance, j'écris depuis quinze ans sur mon blog Graine de Sportive, et j'ai collaboré avec plusieurs médias. Contactez-moi pour me confier vos besoins sports et loisirs !

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